La plupart des organismes de formations ont déjà fait appel à des sous-traitants pour les soulager d’un surplus d’activité, améliorer leur rentabilité ou bien proposer de nouveaux types de formations dans lesquels ils ne sont pas experts.
Mais la sous-traitance, bien que très pratique et avantageuse sur certains aspects, recèle également de difficultés auxquelles on ne pense pas forcément.
Dans cet article, ce sont des sous-traitants et des organismes de formation de notre communauté OF Connect qui témoignent de leurs expériences pour vous donner des clés si vous envisagez de vous lancer dans l’aventure de la sous-traitance !
Parlez-moi un peu de vous et de votre organisme de formation ?
Pauline : Je suis la fondatrice de La Boîte à Indés et de La Boîte à Indés Académie. J’ai construit La Boîte à Indés comme une communauté d’entrepreneurs indépendants, pour partager nos bonnes pratiques, nos ressources, nos méthodes et pour mutualiser des outils pour les économies d’échelle.
Lorsque Qualiopi a été mis en place, les membres de la communauté qui étaient une soixantaine, se sont vite aperçus que le coût et le temps passé pour obtenir la certification risquaient de rendre leur activité de formation plus difficile et qu’ils risquaient de perdre un volume non négligeable de chiffre d’affaires s’ils laissaient de côté la certification.
Dans notre mission de mutualisation, nous avons donc décidé de proposer le portage de la certification et de créer l’organisme de formation « La Boîte à Indés Académie » tel qu’il existe aujourd’hui. Nous offrons cette solution à plus de 90 formateurs indépendants à travers toute la France.
Nathalie : J’ai créé ma société il y a de ça trois ans. Mon travail consiste à accompagner les salariés, les entrepreneurs et les demandeurs d’emploi pour les aider à reprendre confiance en leur capacité, notamment grâce à la formation professionnelle, au bilan de compétence, à la méthode Ikigaï et au conseil en image. J’interviens généralement au sein d’organismes de formation certifiés Qualiopi. Je m’adresse à un public qui a eu un parcours difficile et qui a besoin d’accompagnement pour retourner à l’emploi. Je les aide ainsi à travailler leur CV, à se préparer à un entretien d’embauche et à revoir leur posture professionnelle.
Stéphanie : Je suis directrice de Numericoach, organisme de formation mais pas que : nous sommes aussi éditeurs de contenus, entreprise de services numériques et revendeurs de licences, tout ça sur le thème unique de Google Workspace. En plus de gérer l’entreprise, je m’occupe de la sous-traitance, du management des équipes et de l’administratif. Aujourd’hui nous sommes 25 collaborateurs et nous faisons appel à 75 freelances.
Quels sont les avantages apportés par le fait de faire appel à des sous-traitants ?
Pauline : Au regard des préoccupations actuelles, il est nécessaire de tenir compte de la mobilité, du besoin de proximité et de la logique de relocalisation. Pourvoir les besoins en formateurs par des temps pleins salariés se révèle ainsi complexe et injustifié.
Si les OF devaient salarier les formateurs sur tous les champs pour lesquels ils sont sollicités, le volume d’emplois précaires (CDD ou temps partiels) augmenterait en conséquence.
Les pouvoirs publics souhaitent développer la formation professionnelle. Néanmoins, le cadre réglementaire qui en découle est limitant et peut porter préjudice aux formateurs indépendants et petits OF qui ont des profils agiles et parfois très experts, besoins auxquels certaines grandes structures sont souvent dans l’incapacité de répondre.
Dispenser des formations contribue à sécuriser une partie des modèles économiques des prestataires de services indépendants : les consultants/coachs/formateurs, par exemple. Nous avons également observé une implication plus importante concernant la veille chez les indépendants. Une veille efficace contribue à l’amélioration continue de ses pratiques et au renforcement de ses compétences métiers afin de rester en contact avec son marché et son écosystème, rendant ainsi son activité pérenne et viable.
Nathalie : Je pense que cela leur permet de rester dans leur cœur de métier. Autre avantage : disposer de plusieurs intervenants auprès du même public. Les approches sont différentes, ce qui augmente les chances de toucher tous les apprenants.
Stéphanie : Je vois trois avantages :
L’expertise : faire appel à des sous-traitants offre un panel de compétences et de connaissances. Certains étaient gestionnaires de paie ou contrôleurs de gestion dans un grand groupe et cela permet d’ajouter une vraie expérience métier en plus de la compétence Google Workspace.
Une plus grande zone géographique : faire appel à des sous-traitants nous permet d’opérer dans un rayon plus large.
Le désengorgement de notre activité : nous pouvons ainsi réaliser toutes les prestations dans les pics d’activité sans augmenter le personnel pour autant, un réel avantage.
Devenir sous-traitant dans un OF : quels avantages pour les formateurs indépendants ?
Pauline : Le formateur indépendant délègue une partie de la relation client et de l’administratif auprès de l’OF, ce qui est intéressant pour lui. Dans le cadre de la certification Qualiopi, le formateur passerait davantage de temps à vérifier sa conformité réglementaire, qu’exercer son métier, sans oublier le coût que représente la certification tant pour son acquisition, que pour son maintien.
En collaborant avec une entreprise de portage comme la nôtre, le formateur indépendant peut se concentrer sur ses missions de formation et uniquement celles-ci. Il dégage ainsi un temps supplémentaire pour sa veille et la recherche d’innovation dans ses programmes pédagogiques.
Le dernier avantage réside dans la définition même du métier de formateur indépendant, qui est une activité individuelle et le fait d’intégrer une communauté de pairs. En effet, notre organisme développe une communauté dans laquelle nos membres viennent enrichir leur veille commune, leurs questionnements et trouver des pairs de profils divers et variés.
Nathalie : Pour un formateur indépendant, sous-traiter son travail à un organisme de formation permet de casser la routine et d’éviter la solitude. Collaborer et créer des partenariats avec plusieurs OF permet de développer son réseau, de découvrir les tendances et les différentes méthodes pédagogiques de chacun.
Stéphanie : Chez Numericoach nous avons fait le choix de fournir les contenus pédagogiques pour faire gagner du temps aux indépendants et assurons un règlement rapide de leurs prestations.
Quels sont, au contraire, les inconvénients de la sous-traitance ?
Pauline : La sous-traitance est exigeante en termes de cadres et de procédures. Trop souvent les OF confondent sous-traitance et portage. Ce sont deux métiers différents. Faire appel à un formateur sous-traitant occasionnellement offre une réelle agilité dans le développement d’une entreprise. Une sous-traitance quasi systématique entraîne quant à elle le portage, imposant ainsi des obligations sociales et un cadre différents.
Nathalie : Inconvénients majeurs : une faible possibilité de négociation pour la rémunération et les périodes creuses.
Stéphanie : Il s’avère difficile de conserver une relation sur la durée avec nos sous-traitants du fait de leur liberté. L’augmentation des tarifs peut aussi être difficile à absorber, diminuant ainsi la rentabilité des prestations. Concernant les process, il est difficile d’en imposer aux sous-traitants sans basculer dans la subordination.
Que pensez-vous de la nouvelle loi relative à l’obligation d’être certifié Qualiopi pour être sous-traitant d’un OF proposant des formations financées par le CPF ?
Pauline : Il est important de noter qu’à ce jour, le décret d’application de cette loi n’est pas effectif.
Ce changement s’avère positif pour réguler les OF et empêcher les dérives. Certains ne prêtent pas attention aux profils des formateurs sous-traitants auxquels ils font appel. Les exigences pédagogiques et techniques sont parfois insuffisantes et causent de réelles problématiques de qualité.
En revanche, cette loi par son caractère global, constitue une aberration. L’obtention de la certification Qualiopi pour un formateur indépendant est dans la majorité des cas, à la fois coûteuse et chronophage. Nous risquons de perdre des profils pertinents si les indépendants ne peuvent plus pratiquer leur métier, ni transmettre leurs compétences sans être certifiés Qualiopi.
Nathalie : Il existe beaucoup de certifications, de labels et de démarches administratives chronophages. Vigilance, car cela peut tuer les petits organismes. Nous ne sommes pas des multinationales, nous n’avons ni le budget ni le temps à consacrer à toutes ces démarches.
Stéphanie : Avec les nombreuses dérives liées au CPF, il est important de durcir les règles. Cela dit, Qualiopi n’est pas forcément garant de la qualité des formations et en cela, cette réglementation peut ne pas faire suffisamment effet. Je suis d’accord avec le fait qu’il est important de réguler le CPF et les aides de la formation en général pour éviter les abus il ne faudrait pas alourdir la réglementation et punir les OF qui respectent les règles.
Que conseilleriez-vous à un organisme voulant faire appel à un sous-traitant ou à un formateur qui souhaitant proposer ses services pour le compte d’un autre OF ?
Pauline : Avant de se lancer dans la sous-traitance, il est nécessaire d’étudier les compétences techniques et pédagogiques du formateur et son niveau d’adéquation aux besoins afin de s’assurer de sa compatibilité avec client confié.
J’invite ensuite les formateurs indépendants à vérifier les structures de portage et les organismes avec qui ils souhaitent collaborer. Il est important de veiller au respect de propriété intellectuelle en s’assurant d’une mention dans le contrat stipulant la propriété des contenus pédagogiques. Vigilance également concernant les frais cachés du monde du portage et se questionner sur la part d’administratif à traiter, les exigences et le temps total de la sous-traitance.
Nathalie : Concernant l’organisme de formation, je l’encouragerais à rencontrer physiquement ses futurs formateurs afin de découvrir leur personnalité et de déterminer leur correspondance avec l’apprenant.
Au formateur, je lui conseillerais de se renseigner sur le site Web de l’organisme et de s’y rendre si cela est possible pour lui. En effet, il existe de nombreuses arnaques.
Stéphanie : Je conseillerais à l’organisme de se renseigner sur l’aspect juridique avant de se lancer puisqu’il faut créer un contrat de sous-traitance et cadrer les conditions de la relation tout en se protégeant soi-même et le sous-traitant.
Pour les sous-traitants, je dirais qu’il ne faut pas non plus se laisser marcher sur les pieds par les organismes de formation, si vous vous êtes assurés de la qualité de votre travail et que vous savez ce que vous faites, alors foncez, les OF ont besoin de vous !
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