Former les formateurs, voilà qui sonne comme une évidence… et pourtant ! Aujourd’hui encore, les formateurs sont avant-tout des experts… ce qui est une bonne chose, mais à condition d’être aussi un fin pédagogue. Or, force est de constater que bon nombre de formateurs marchent sur une jambe. Quelques questions pour réfléchir sur le sujet : combien ont suivi une formation à l’andragogie (la pédagogie adaptée aux adultes) ? Combien sont à la fois expert, formateur, facilitateur et coach ? Difficile de trouver une enquête rigoureuse, mais cette presque absence d’information est un indice : on forme peu à l’art de la transmission des savoirs et compétences, la fameuse andragogie ! Alors si vous êtes un formateur ou une formatrice, j’ai une bonne nouvelle : vous trouverez ici une synthèse des nouveaux enjeux et besoins du monde de la formation, ainsi que 3 pistes pour faire de chaque formateur un passeur (extra)ordinaire !
Si je vous dis que je vais vous parler de Montaigne dans un article sur les formateurs, vous allez me dire « mais quel est le lien mon cher Victor !? ». Eh bien le voici : « ce sont toujours les cordonniers qui sont les plus mal chaussés », soit un adage populaire qui aurait pour source une réflexion de Montaigne dans un de ses essais au 16e siècle. Toujours pas ? Ce que nous dit le célèbre philosophe, sans le savoir et avec 5 siècles d’avance (quel visionnaire !), c’est que les formateurs français sont peu, voire pas formés à leur cœur de métier : transmettre ! En effet, les formateurs passent leur journée à former les autres, à transmettre des savoirs et des compétences et, POURTANT, le mot andragogie leur est souvent inconnu. Pourquoi c’est un problème ? On en parle ici !
Plus de formateurs, mais sont-ils formés ?
+31 % d’OF entre 2018 et 2022 (soit 88 000 pour cette même année), et surtout un presque doublement des formateurs indépendants (37 315) durant la même période. Nous devrions donc avoir, en toute logique, une croissance importante du nombre de formateurs certifiés, ou à minima des formateurs ayant suivi une formation de formateurs.
Or, impossible de trouver une telle information ! J’ai bien contacté le détenteur de la certification « Conception, animation et évaluation d’une action de formation », qui est adoubé par France compétences. Sans retour. J’ai bien cherché sur plusieurs dizaines de sites, institutionnels et privés, sans trouver d’information tangible supposant une hausse importante des formations de formateurs.
Faute de chiffres officiels, j’ai contacté plusieurs formateurs.
Le constat est préoccupant : sur 10 formateurs, seulement 3 ont suivi une formation de formateurs. Difficile de tirer une conclusion d’un échantillon aussi réduit, mais étant moi-même formateur de formateurs, je ne peux que constater, par ma petite fenêtre, le manque patent de formation en andragogie, domaine pourtant crucial pour garantir la qualité et l’efficacité des formations.
Des enjeux nouveaux qui nécessitent de repenser le rôle du formateur
Former nos formateurs (mais également les responsables formations, les managers, les RH, les leaders… bref toute personne qui a une activité, même partielle, de transmission des compétences) paraît d’autant plus crucial quand on regarde les enjeux de la formation. Enjeux qui évoluent constamment pour s’adapter aux changements technologiques, sociétaux et économiques. Petit tour d’horizons des défis d’aujourd’hui et de demain !
Formation à distance et en ligne
Avec l’avènement des technologies numériques, et bien « aidée » par le Covid, la formation à distance et en ligne est devenue de plus en plus populaire. Les organisations doivent relever le défi de créer des environnements d’apprentissage en ligne efficaces, interactifs et engageants pour répondre aux besoins des apprenants éloignés ou ceux qui préfèrent apprendre à leur propre rythme. Plus qu’un défi, une nécessité, pour laquelle bon nombre de formateurs ne sont pas (encore) armés.
Formation personnalisée et adaptative
Les apprenants ont des besoins et des styles d’apprentissage différents. Les nouvelles technologies permettent de fournir des formations personnalisées et adaptatives, qui s’ajustent en fonction des préférences, des compétences et du niveau de compréhension de chaque apprenant. Et, au-délà des technologies, c’est bien au formateur de s’adapter à chacun.
Développement des compétences du 21e siècle
Les compétences telles que la pensée critique, la résolution de problèmes, la collaboration, la communication et la créativité sont de plus en plus importantes dans le monde du travail. Les programmes de formation doivent donc être conçus pour développer ces compétences chez les apprenants, de manière transversale, ce qui suppose de revoir les modalités et d’incorporer de l’expérientiel.
Formation tout au long de la vie
Dans un monde en constante évolution, il est essentiel pour les individus de continuer à apprendre et à se former tout au long de leur vie. Les organisations doivent encourager une culture de l’apprentissage continu et fournir des opportunités de formation professionnelle et de développement personnel à leurs employés à toutes les étapes de leur carrière. Facile à dire me direz-vous !
Inclusion et diversité
Les programmes de formation doivent être accessibles à tous, quelle que soit leur origine ethnique, leur genre, leur âge ou leur situation socio-économique. Il est important de tenir compte des besoins spécifiques des différents groupes d’apprenants et de garantir qu’ils se sentent inclus et représentés dans les programmes de formation. Cette phrase a de toute évidence une importance et un sens légèrement différent en fonction de votre génération (je sais je sais, je caricature un peu, mais vous avez compris l’idée)… Quoi qu’il en soit, nul doute que l’inclusion et la diversité sont des thèmes désormais centraux, et c’est tant mieux !
Évaluation de l’efficacité de la formation
Les organisations doivent être en mesure de mesurer l’impact de leurs programmes de formation et d’identifier les domaines où des améliorations sont nécessaires. Cela nécessite la mise en place de systèmes d’évaluation robustes pour suivre la progression des apprenants et évaluer l’efficacité des méthodes pédagogiques utilisées. Comprendre : le simple questionnaire de fin de formation n’est peut-être plus suffisant. Là aussi, le formateur doit avoir les bons outils et les bonnes connaissances pour répondre à cet enjeu.
Nous venons de le voir, ce ne sont pas les enjeux (certains diront même les défis) qui manquent ! Voyons maintenant comment y faire face.
Plusieurs possibilités pour les formateurs
Suivre une formation de formateur
Pour vous former, quoi de plus intuitif que de retourner à l’école ? Une école pour adulte bien sûr ! Il existe beaucoup de programmes de formations de formateurs, et la durée, comme les prix, comme la qualité, est très variable… tout dépend de vos besoins ! A titre d’exemple, nous avons chez We Hate School créer une académie pour les formateurs, avec trois objectifs simples : mieux concevoir, mieux animer, mieux vendre. Ces objectifs pédagogiques n’ont pas été choisis au hasard, ce sont ceux qui sont ressortis comme prioritaires par une enquête que nous avons mené auprès de plus de 250 formateurs en 2023.
Apprendre par soi-même
Einstein disait « apprendre n’est qu’expérience, tout le reste n’est qu’information. » Si c’est un peu réducteur, on peut faire confiance au célèbre physicien : rien ne vaut la pratique ! Si bon nombre de formateurs n’ont pas suivi de formation de formateurs, c’est bien souvent parce qu’ils n’en voient pas l’utilité. Après tout, 10 ans d’expérience, ça vaut bien plus qu’une formation de quelques semaines ? Oui, mais… attention à l’excès d’orgueil, une petite mise à jour est souvent nécessaire… et salutaire
Partir en learning expedition
En se concentrant sur les meilleures pratiques, cette plongée temporaire favorise une expérience d’apprentissage pratique et concrète, souvent très inspirante, permettant aux participants de comprendre en profondeur les enjeux et les dynamiques propres à l’apprentissage de demain. A utiliser sans modération (même si le coût d’une learning expedition est souvent un frein) au sein d’entreprises innovantes du secteur et de pays avant-gardistes, à l’image des pays du Nord.
Nous venons de le voir, les enjeux ne manquent pas ! En y répondant, les organisations peuvent créer des programmes de formation plus efficaces et pertinents qui permettraient aux apprenants de développer les compétences dont ils ont besoin pour réussir dans un monde en constante évolution. Et, au centre de ce challenge ô combien important pour notre société qu’est le « mieux former », le formateur a un rôle central… et complexe ! Tellement complexe, qu’on ne voit pas bien comment il ou elle pourrait le mener à bien sans une formation adéquate. Vous savez ce qu’il vous reste à faire
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