CPF et employeur : enfin le décollage ?

La possibilité pour les employeurs de procéder à un versement volontaire sur le CPF de ses salariés existe depuis plusieurs années. Pour autant, force est de constater que cette possibilité a été très sous-utilisée par les entreprises.

Ainsi, depuis 2019, seulement 283 millions d’euros ont été versés sur les compteurs CPF des salariés. Cette somme est à relativiser puisque seulement 83 millions d’euros sont des versements volontaires, liés à un projet de formation (le reste étant lié majoritairement au non-respect de l’obligation sexennale).

 

Abondement employeur
Montant des abondements employeur (Source CDC)

Les raisons d’une faible appropriation

Cette faible appropriation s’explique traditionnellement par plusieurs facteurs

Culturel

Le CPF est souvent vu comme un droit individuel par les employeurs. Ceux-ci ne cherchent donc pas nécessairement à s’immiscer dans des projets de formation de leurs salariés. A contrario, ces derniers ne souhaitent pas forcément mettre en visibilité de l’entreprise des choix de formation qui pourraient donner des indications sur d’éventuels souhaits de départs ou d’évolution.

Organisationnel

Mettre en place une politique d’abondement peut se relever chronophage, notamment quand on ne dispose pas de personnel dédié à la GEPP ou tout simplement un(e) responsable formation, voire un(e) RH.

Économique

Il existe une grande hétérogénéité dans l’investissement formation des entreprises. Si certaines investissent des moyens significatifs, d’autres en font peu, voire pas du tout. Ainsi, même si le mix CPF/financement employeur peut s’avérer avantageux, cela reste encore davantage que ce que certaines entreprises sont prêtes à consentir.

Au final, le facteur économique rejoint bien souvent le culturel, puisque la formation est très souvent vue comme un coût plutôt que comme un investissement.

Un nouveau décret qui change tout ?

La sortie du Décret n° 2025-341 du 14 avril 2025 relatif aux modalités d’alimentation supplémentaire du CPF se veut un tournant par rapport à la faible mobilisation des entreprises. Le pari ? Lever les freins techniques et psychologiques à l’abondement CPF pour créer une transformation des habitudes des entreprises, et venir financer le dispositif dans un contexte de rigueur budgétaire.

Pour cela, le décret va créer un nouvel espace dédié aux tiers finançeurs (OPCO, Régions, employeurs…) qui sera hébergé par la Caisse des dépôts et consignations  en s’appuyant sur la plateforme « Mon Activité Formation ». À noter qu’un espace employeur existe déjà depuis plusieurs années. En effet, le service EDEF, accessible sur net-entreprises.fr permet déjà aux employeurs de réaliser des dotations sur le compte CPF de leurs salariés. On peut donc logiquement penser que la nouvelle plateforme devrait prendre le relai de cet espace.

4 principales fonctionnalités vont être embarquées dans cette application :

  1. Fixer le montant de l’abondement sur le CPF des bénéficiaires (par exemple : 200 euros ou encore le reste à charge de la formation en cas de CPF insuffisant) ;
  2. De réaliser le versement des fonds correspondants directement à la CDC qui pourra l’intégrer sur le compte des bénéficiaires ;
  3. De fixer les conditions d’utilisation de ces droits (par exemple : formation sur le management uniquement et/ou inscription dans les 3 mois suivant l’abondement…) ;
  4. De suivre ou demander un remboursement si les conditions ne sont pas remplies, à l’image d’une clause de dédit-formation.

Lever les freins techniques pour transformer les habitudes

Ces nouvelles possibilités techniques orientent vers ce qu’on pourrait qualifier d’un

 guichet uniquement de l’abondement 

Cela va clairement dans le bon sens, et devraient permettre davantage de transparence et de lisibilité sur les critères d’attribution et les conditions pour en bénéficier.

Côté organisme de formation, il y a un vrai enjeu à se saisir de ces nouveautés pour accompagner au mieux les bénéficiaires sur leurs droits et les possibilités de financements complémentaires auxquels ils ont droit.

Cela leur permettra aussi de se positionner sur les appels à projets des branches pour intégrer les formations ciblées qui bénéficient d’un abondement pour les bénéficiaires, et sont donc de fait commercialement plus avantageuses. C’est en effet une question qui revient souvent du côté de nombreux OF : « Comment ont été référencées ces formations et pourquoi pas les miennes ? ».

Le décret est entré en vigueur le 17 avril dernier. On attend désormais une présentation de cette nouvelle plateforme qui lance une nouvelle ère de l’abondement.
Au point de changer complètement de paradigme côté entreprise ?

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