Formation professionnelle : un virage réglementaire en 2025 ?

Tous les professionnels du secteur ont pu remarqué que la formation professionnelle était entrée dans une phase de transformation marquée par un durcissement du cadre réglementaire et financier. Nous avons assez de recul pour comprendre cette année 2025 et ses changements.

Les organismes de formation et centres de formation d’apprentis doivent naviguer entre nouvelles restrictions budgétaires, contrôles renforcés et revalorisation des rôles des financeurs. Le distanciel, en particulier, se retrouve sous le feu des projecteurs.

Financement CPF : tri sélectif et co-construction

Première mesure d’envergure : les formations liées à la création ou reprise d’entreprise (ACRE) ne sont plus éligibles au CPF, sauf si elles sont inscrites au RNCP ou au RS. Une volonté de recentrer les financements sur des formations certifiantes reconnues.

En parallèle, la participation forfaitaire du titulaire du CPF s’élève à 102,23 € en 2025. Si cette somme peut être neutralisée par un abondement de l’employeur, elle reflète une volonté claire : impliquer davantage les entreprises dans la co-construction des parcours de formation. Les nouvelles règles permettent aux employeurs d’imposer les thématiques des formations et d’en fixer les délais d’utilisation, transformant l’abondement en outil stratégique de pilotage RH.

Apprentissage : hausses de contributions et baisse des aides

Le financement de l’apprentissage subit aussi un tour de vis. Dès le 1er juillet 2025, les employeurs devront verser une contribution de 750 € pour chaque contrat d’apprentissage de niveau bac+3 ou plus. Ce reste à charge entraînera mécaniquement une baisse des niveaux de prise en charge par les OPCO.

Autre nouveauté : les aides à l’embauche d’apprentis diminuent de 1 000 € pour l’année 2025.

Elles passent à :

  • 5 000 € pour les entreprises de moins de 250 salariés.

  • 2 000 € pour les grandes entreprises (titres bac+5).

  • 6 000 € en cas d’embauche d’un apprenti en situation de handicap (tous niveaux).

Enfin, un décret en attente pourrait autoriser une minoration des financements dès lors qu’une part, même faible, de la formation est réalisée à distance. Le seuil de 80 % de distanciel a été évoqué comme déclencheur d’une baisse de 20 % des niveaux de prise en charge.

Le digital dans le viseur ?

Alors que la formation à distance avait gagné en légitimité depuis la crise sanitaire, elle semble aujourd’hui sous tension. Plusieurs décisions sectorielles récentes vont dans le sens d’une remise en cause partielle de cette modalité : interdictions spécifiques (comme pour le CAP petite enfance ou certaines formations en hôtellerie et restauration), ou décotes financières en cas de recours au distanciel.

Ces orientations interrogent : que reste-t-il de la « continuité pédagogique » promue en 2020 ? Et comment garantir l’égalité d’accès à la formation sur les territoires si l’offre à distance est découragée ?

Des contrôles plus fréquents et plus stricts

Trois types de contrôles se renforcent simultanément :

  • Contrôle par les OPCO : vérification que la prestation a bien été réalisée. Depuis le mois de mai 2024, les OPCO peuvent exiger des pièces justificatives complémentaires, y compris pour les formations à distance. Une feuille d’émargement signée électroniquement, des logs de connexion ou des preuves d’activités réalisées sont attendus. En cas d’absence de preuve, le financement peut être refusé.

  • Contrôle qualité (OPCO et GIE D²OF) : un nouveau référentiel à 19 indicateurs impose aux prestataires des procédures internes de sécurisation, d’authentification des documents et de traçabilité des apprenants. Ce référentiel s’ajoute à celui de la certification Qualiopi, créant une superposition d’exigences.

  • Contrôle qualité (CDC – CPF) : deux niveaux sont instaurés. Le niveau standard (2 dossiers) et le niveau exhaustif (3 dossiers + visite sur site). Objectif : améliorer la qualité des offres CPF et lutter contre les fraudes. Des recommandations voire sanctions pourront être émises en cas de non-conformité.

Une vigilance indispensable

Face à cette densité réglementaire, les prestataires doivent faire preuve d’une rigueur accrue dans leur organisation, leurs choix pédagogiques et leurs relations avec les financeurs. Les enjeux ne sont pas uniquement administratifs : c’est l’accès à la formation, la reconnaissance des modalités innovantes et parfois, la viabilité même des structures qui se jouent ici.

Ce durcissement pose une question de fond : comment concilier innovation pédagogique et exigence de qualité, sans fragiliser les acteurs engagés dans la transformation du secteur ?

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